Action & lobby
Pourquoi y a-t-il si peu de cyclistes à Liège (ou, comme on dit là-bas : "Poqwè n’a-t-i si pô d’rôleus a vélo a Lîdje ?"). À quelles conditions les Liégeois pourraient-ils envisager d'utiliser le vélo ? Pour répondre à ces questions, le GRACQ Liège a commandé une enquête à l’Université de Liège, à laquelle 678 personnes ont répondu.
Les personnes sondées
L'échantillon se veut une photographie de la diversité des usagers de l’espace public à Liège de plus de 16 ans. Une large majorité des répondants sont des usagers fréquents et occasionnels des rues de Liège. Environ la moitié s’y déplacent plus de 5 fois par semaine et un quart des répondants s’y déplacent au moins 2 fois par semaine. Dans une proportion moindre, l’enquête recueille également les réponses d’usagers plus occasionnels et de passage.
Principaux résultats
L’enquête révèle tout d’abord l’important potentiel de développement du vélo à Liège. À la question « Quand les conditions météo le permettent, considérez-vous que vos trajets quotidiens soient envisageables en vélo ? », six répondants sur dix répondent par l'affirmative. Parmi eux, quatre estiment leurs déplacements intégralement envisageables à vélo et deux l’envisagent en complément des transports en commun ou de la voiture.
Quand on met ces chiffres en parallèle avec la part modale actuelle du vélo, estimée entre 2% et 3% des déplacements, on mesure toute l’ampleur de ce potentiel. Toute la question est alors de savoir pourquoi si peu d’usagers de Liège utilisent le vélo ?
Les freins les plus fréquemment cités sont : la dangerosité (55,8%), la distance (50,5%), le relief (49,9%) ou le simple fait de ne pas y penser (45.9%).
Le problème de la distance concerne toutefois essentiellement les répondants non-Liégeois. En revanche, les Liégeois, bien plus que les usagers de Liège issus d’autres communes ont un sentiment d’incapacité à rouler à vélo.
Les répondants révèlent par ailleurs une situation très négative du vélo à Liège :
pour 9 répondants sur 10 les pistes cyclables ne sont pas en nombre suffisant
pour 8 répondants sur 10 les cyclistes ne disposent pas de suffisamment d’espace
pour 8 répondants sur 10 les cyclistes ne sont guère respectés par les autres usagers
pour 3 usagers de l’espace public liégeois sur 4 le stationnement vélo est insuffisant
Quant à la vision de la politique en matière de Mobilité, un répondant sur quatre estime que rien ou presque n’a été fait pour les cyclistes ces dernières années et la moitié des répondants estiment que, si des améliorations ont été apportées, celles-ci restent insuffisantes. Seulement 2% estiment que Liège est désormais une ville cyclable.
Enfin, sur le plan des mesures à prendre en faveur du vélo, 8 répondants sur 10 estiment que la création d’un réseau cyclable séparé du reste de la circulation est le premier levier susceptible de favoriser leur utilisation du vélo.
Parmi les autres mesures plébiscitées il y a la prime à l’achat d’un vélo électrique, l’installation de stationnements vélo sécurisés, la lutte active contre le stationnement sauvage sur les pistes cyclables et la création d’un système de vélo en libre-service.
Conclusions
Ces réponses montrent que les principaux freins au développement du vélo relèvent de causes sur lesquels les pouvoirs publics ont la possibilité d’agir (infrastructures, soutien à l’achat d’un vélo à assistance électrique, formations, libération régulière de l’espace public des voitures afin de favoriser la pratique du vélo…). Moyennant une action politique forte et raisonnée en faveur du vélo, les difficultés les plus citées par les répondants peuvent être levées.
Pour lever le premier frein au développement du vélo à Liège (le sentiment de dangerosité), la première mesure à prendre est celle du développement d’un réel réseau cyclable en site propre faisant la jonction entre le centre-ville et les quartiers. Il importe donc de remettre sur les rails ce projet, entamé entre 2011 et 2016, qui semble avoir été oublié au profit du RAVeL rive gauche ou de 15 corridors cyclables non connectés
Pour lever la difficulté du relief, le GRACQ soutient les primes à l’achat de vélo à assistance électrique, un téléphérique avec vélo embarqué et des bus équipés pour embarquer les vélos.
Quant au frein lié au fait de « ne pas y penser », le GRACQ invite les politiques à réimplanter le vélo dans l’imaginaire collectif liégeois au moyen d’évènements permettant l’usage du vélo (dimanches sans voitures) ou de campagnes de communication sur les avantages du vélo. Ces évènements pourraient contribuer à une mise en selle régulière dès le jeune âge. À cela pourraient s’ajouter des formations délivrées gratuitement à l’ensemble des Liégeois.
Il importe aussi de lutter contre le sentiment spécifique aux Liégeois de ne pas être capables de rouler à vélo. Enfin, les cyclistes et non-cyclistes Liégeois attendent enfin une politique de lutte contre le stationnement sauvage sur les pistes cyclables.
Johan Tirtiaux (GRACQ Liège)